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DATE DE PUBLICATION : 23 OCTOBRE 2024

Des diagnostics rapides et efficaces sont essentiels pour identifier les personnes infectées par le mpox (MPXV),virus potentiellement mortel appelé auparavant virus de la variole du singe. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a déclaré l'épidémie « urgence de santé publique internationale » en août 2024, deux ans seulement après une épidémie identique survenue en 2022. De nombreux hauts responsables de la santé ont appelé à une réaction internationale coordonnée afin d'enrayer la propagation et de sauver des vies.

Fort de cette expérience, le docteur David O. Freedman, professeur et épidémiologiste de l'université de l'Alabama à Birmingham, apporte des éclaircissements sur la gestion des épidémies dans un monde post-pandémique. 

L'évolution de la menace du Mpox nécessite une action mondiale

Il existe deux clades distincts de Mpox, appartenant au genre Orthopoxvirus comme la varicelle et la variole. Le clade I, historiquement endémique en Afrique centrale, est au cœur de la flambée de 2024. Ce variant se caractérise par une virulence accrue et des voies de transmission plus diversifiées, notamment le contact cutané non sexuel et le contact avec des surfaces contaminées.

L'épidémie de 2024 diffère nettement de l'épidémie mondiale de 2022, principalement attribuée au clade II mpox, endémique en Afrique de l'Ouest et se propageant généralement par contacts sexuels. La réapparition du clade I nécessite une réévaluation des stratégies de santé publique en raison de ses caractéristiques épidémiologiques et de ses résultats cliniques différents.

« La réaction de 2022 s'est concentrée sur les pays riches qui, à l’époque, disposaient des ressources nécessaires pour les vaccins, l'éducation à la santé publique et l'intervention » explique le Docteur Freedman, spécialiste de la médecine tropicale et de la sécurité sanitaire mondiale. « L'épidémie due au clade II a pris naissance en Afrique mais, en raison des ressources déjà limitées par la pandémie de COVID, il n'y a pas eu de volonté politique d'intervenir dans les pays à l'origine de cette épidémie, où le virus mpox a continué à se développer dans l'attente d'une nouvelle mutation et d'une nouvelle propagation. »

 

En 2024, la République démocratique du Congo (RDC) a déclaré plus de 21 000 cas et plus de 600 décès liés au clade I du mpox, avec une extension de l'épidémie aux pays voisins. Bien que l'épicentre reste en Afrique, des cas ont été détectés dans des pays comme la Suède et la Thaïlande, ce qui montre bien que, comme d'autres maladies infectieuses, le mpox ne connaît pas de frontières. 

Enjeux de la lutte contre l'épidémie de mpox

L'épidemie actuelle de mpox a mis en lumière des disparités persistantes dans l'affectation des ressources sanitaires mondiales qui font écho aux problèmes observés lors de la pandémie de COVID-19. Les pays à revenus faibles et intermédiaires continuent de se heurter à des obstacles importants dans la mise en œuvre de mesures efficaces de lutte contre les maladies.

« Nous avons besoin d'une couverture vaccinale, de diagnostics et d'une éducation publique partout » déclare le docteur Freedman. « Nous n'avons pas besoin de blocus très restrictifs aux échanges commerciaux et aux déplacements entre les pays. Les pays riches restent réticents à partager leurs ressources, surtout s'il n'y a pas de menace directe importante. »

Les pays à revenus faibles et intermédiaires sont confrontés à un accès limité aux outils et technologies essentiels, ce qui entrave leur capacité à effectuer une surveillance efficace des maladies, des tests de diagnostic et la localisation des contacts. Cela entraîne probablement un nombre de cas déclarés inférieur à la réalité, ce qui masque l'ampleur réelle de la flambée et entrave les interventions ciblées.

La réaction mondiale à l'épidémie de mpox s'est heurtée à d'importants obstacles, ce qui a freiné la fourniture de l'aide nécessaire. « L'OMS n'a annoncé la pré-homologation du vaccin MVA-BN que le 13 septembre 2024 à destination des adultes de 18 ans et plus. La flambée a explosé en juillet » ajoute le docteur Freedman.« Ce retard a mis en évidence, dans le système de passation des marchés de l'OMS, des lacunes qui ont été longues à combler. »

Des mesures destinées à améliorer les capacités de réaction régionales sont en cours, comme l'initiative de l'Union africaine en vue de la création de l'Agence africaine des médicaments ) mais le projet a été retardé en raison de problèmes de leadership et de gouvernance. La réaction engagée par l'OMS met l'accent sur les progrès de la recherche et la garantie d'un accès équitable aux contre-mesures médicales en travaillant avec différents partenaires internationaux, régionaux et locaux pour renforcer la coordination et améliorer les capacités de diagnostic, en particulier dans les régions touchées comme la RDC et les pays voisins.

La nature récurrente des épidémies sur le continent africain confirme la nécessité d'améliorer la coopération régionale et mondiale. Comme le souligne le docteur Freedman, « La leçon de santé publique reste la même : personne n'est en sécurité tant que nous ne sommes pas tous en sécurité dans le monde ». « Nous vivons dans un village planétaire. La réponse réside dans le partage des vaccins et des diagnostics qui profite à tous. »

Le rôle essentiel des diagnostics

Le diagnostic précis du mpox présente des difficultés importantes en raison de son tableau clinique non spécifique et de sa similitude génétique avec d'autres orthopoxvirus. En outre, l'évolution de l'épidémiologie et des modes de transmission du mpox complique encore la création de définitions de cas et de critères de dépistage homogènes.

Pour résoudre le problème de l'accessibilité des diagnostics du mpox, le Comité consultatif des diagnostics des CDC d’Afrique s'est réuni à Kigali, en août 2024, pour examiner les données disponibles sur les tests moléculaires du mpox afin de dresser une liste restreinte des tests qui seront utiles pour identifier les cas de mpox. Cette liste restreinte est destinée à offrir des orientations aux CDC d'Afrique, aux pays et à d'autres partenaires sur les tests moléculaires utiles et de qualité à acquérir et à utiliser dans le cadre de la réaction à la flambée.

Dans ce contexte, des méthodes de diagnostic très spécifiques sont essentielles pour l'identification précise des cas et l'isolement efficace des sujets infectés. Bien que plusieurs tests de diagnostic soient disponibles sur le marché, leur distribution et leur mise en œuvre se heurtent à des obstacles importants, en particulier dans les zones fortement touchées.

Selon le docteur Freedman, plusieurs stratégies méritent d'être envisagées pour améliorer les capacités de diagnostic : 

1.      Disponibilité accrue des tests PCR multiplex.

« L'OMS recommande de confirmer l'infection par le MPXV à l'aide d'un test d'amplification de l'acide nucléique en utilisant une réaction en chaîne de la polymérase (PCR) en temps réel ou classique sur les échantillons de lésions pour détecter des séquences uniques d'ADN viral » explique le docteur Freedman.

2.      Utilisation de cibles génomiques multiples.

« La séquence et la variabilité du clade I de cette flambée sont moins bien connues. Il reste donc beaucoup à faire pour mettre au point une PCR permettant de détecter la souche de la flambée par rapport à d'autres virus apparentés dans la région » poursuit le docteur Freedman.  

3.      Validation des outils de diagnostic au point d'intervention.

« La PCR et le séquençage qui suit sont des opérations de haute technologie et complexes, l'idéal est donc de disposer d'un test rapide au point d'intervention.  Nous en sommes encore loin, même si des prototypes sont proposés » selon le docteur Freedman.

La mise au point et la distribution d'outils de diagnostic fiables, d'un bon rapport coût-efficacité et faciles à utiliser pourraient améliorer considérablement la lutte contre les épidémies. Ces progrès permettraient non seulement d'améliorer la détection et la gestion des cas mais aussi de mieux comprendre l'étendue et l'évolution réelles de l'épidémie.

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